CARROSSE D’OR
Carrosse d’or emballé à Paris, et décrivant des cercles ronds autour de lui.
Fumées,
Gènes épars dans la ville,
—Fantastiques torpilles
Eparpillées dans la nuit…
Oh ! Étoiles !
Carrosse d’or incroyablement volubile et mobile,
Caressé par la lune
—Terre disparue !
Carrosse d’or
Créant ses images de rives,
Votre réel…
Volatile carrosse,
— Emporte-moi vers l’inconnu !
L'ÉCHO DES SONGES
Deux lèvres fleuries
Broutent
Dans la langue de Dieu
Un vers
Prairie délicieuse
Des cieux endormis…
Songe, songe
—N’es-tu pas l’écho ?
CHAOS
Je roule dans mon propre feu
Je me consume de mes propres flammes
La lave jaillit de tes naseaux de bronze
Et coule sur un lit de fer
L’écume
—Tes yeux flous—
Mouille
Tes pieds de corail
Tes cheveux sentent la salsepareille
Et tes lèvres-cerises
O Cybèle
Si belles
Grisent
La Nature !
CRÉPUSCULE
L’or du Couchant
Ourlé de tes larmes nocturnes
Des limbes ultimes de l’Azur
Tombait
Sur une forêt
Des Ténèbres…
Et durant l'ultime minute
S’alluma
Au cœur du buisson violet
Le Crépuscule !
L’ÉTERNITÉ
L’Éternité est douce et plane et immanente.
Elle court sur les champs—l’avoine.
Balance sur le fond des mers.
Elle s’étend derrière la ligne du ciel pur,
Et tend au bout de l’horizon
Ses yeux, ses beaux yeux bleus —l’Azur !
À PEDALO
Les roses du soleil sur la mer désolée.
Les mouettes qui rêvaient dans l’éther étoilé…
Nous qui pédalions vers l’horizon bleuté
De tes yeux inversés—Vers l’Éternité !
CIRQUES
Je sors des cirques
Immuable
Mourir
Au bord
Des mers
Ma contemplation sauvage
Expire
L’Homme-nuage
Sur le sable !
RÉSIGNATION
Regarde Les affiches
Résigne-toi
Passe ton temps à te regarder
Dans les glaces
Te reconnaître
À regarder les autres
Dans les glaces
Résigne-toi
Homme
À être à moitié
—La moitié d’une moitié!
STAGNANT
Le Temps ne passe pas
Les piècettes
Que je jette
sur l’étang
rebondissent
—nasse stagnante, brindilles roses—
Que la cigogne rase
Ailes étrangères
M'emportant
Vers l'inconnu!
DÉCOUVERTE
Des cordes tendues dans la nuit
Mais où allez-vous
Je ne vous vois plus
Cordes de la Voix
Cordes du phallus
Il m’aurait fallu
Des années pour l'apprendre
—Les cordes du temps sont en plus!
— Cordes de la pluie…
***
CONVERSATION MUETTE
DANS UN CAFÉ
Elle :
—Au lieu de contempler les lacs de mes yeux noirs
D’y noyer tes regards
Tu devrais en violer le secret désespoir
Me voler ces miroirs
Gardiens de ma mémoire
Moi :
—Tes yeux sont deux miroirs et ta bouche est un lac
Où se noient mes baisers !
***
Car je fus un jour une ancre
Amarrée juste au pied
Du Mont appelé
Volupté
. .
.
RUE DES PETITS CARREAUX
Dans la rue des petits carreaux
On rencontre
Des ouvriers des garçons-bouchers
Des poissonniers des prostituées
Des diseuses de bonne aventure
Qui prédisent l'Avenir
Les rencontres que l'on va faire
Rue des petits carreaux
PORTE SAINT-DENIS
Béante
Ouverte à tous les vents
Elle se tient là
Debout
Symbole d'enceinte disparue
Et de celles
Qui
Un pied sur le mur
Rue Saint-Denis
S’appuient
Sur ce qui va passer
SEXE EN VITRINE (AMSTERDAM)
Dans la vitrine dort
Sur une chaise
Une prostituée
Nue
Avec maintes précautions
Un jeune-homme
S'approche
Puis se glisse
Dans l’escalier du plaisir
Surveillant
Qu'on ne le regarde pas
MURS
Sentiment lointain d’un ailleurs possible
M’approcher du mur du Passé
Pour dépasser l’Impossible
EN ROUTE VERS L’ANGLETERRE
— Une adolescence éternelle. Pouah !
Dehors, il n’y a rien qui me ressemble…
Je pars pour l’Angleterre !
L’ÉTOILE DU NORD
Étoile du Sud
Au Nord
Gonflée de ciel
Étoile du Nord
Femme-Nuit
Flambeau d’or
Éclaire-moi
Encore !
EN FERRY
En Ferry
Sur la Manche m’enroulent
Nuages et fumées
La brume blanchâtre
Je hume l’air
-Embruns !
Je tangue et danse…
LONDRES
À LA GARE DE VICTORIA
À Victoria Station
Un Marin
Me parle de Dieu
Il m’explique
Que l’on ne peut croire
À l’Immensité
Parce qu’elle est
Trop belle
Trop grande
Trop large
Et mystérieuse !
***
Ô Phare de mon âme
Je pense à toi de loin
Dans la cité des Lords
Envahie par les hordes de l’amour !
L’Imagination est la fleur de tous les arbres mûris pour la tombe…
À UN POÈTE ANGLAIS
Tu me dis
« L’Homme c’est de la merde»
Et partis vers le nord
Jetant à la face des Morts
Tes météores
Infatigable Voyageur
Les paumes posées sur les pôles
Tu dansais avec le soleil
Chantant Walt Whimann
Et Henry Miller
Et plantais
Les flèches empoisonnées
De tes vers tranchants et acides
Dans le Cul
Et le plexus
De la Terre
***
Mes jours commencèrent à se creuser dans le jardin
It’s strange, I really don’t know what happened
But London is a decorum of trapps
It’s strange, I really don’t know what happened
In my heart!
***
Que se cache-t-il derrière ces masques ?
Le sexe-terre de sexe…
Pour moi, bien sûr, vos images de rêves.
La Mort n’existe pas !
PASSIONS LUNAIRES
I
EMPREINTES
L’Empreinte du mensonge
La morsure du Soleil
Fleurirent sous les doigts
De rosée sépulcrale
Que j’arrachai
À la face cachée de la Lune
Pendant l’espace
D’une reconnaissance…
Cependant
Je l’avais espérée autrement
Ma blessure
Cette blessure éternelle
L’Empreinte d’un instant
Marqué dans les étoiles !
II
ADIEU-REMEMBER
La violence des Passions,
Conduit les Forces de mon Cœur
À la Solitude éternelle.
Adieu donc.
Et, pour en finir avec l’immortalité du Souvenir,
On s’appellera toujours…
III
J'AI INSULTÉ LA LUNE!
Tu étais venue me rendre visite
Comme un bourreau à sa victime
Sur ton cheval tacheté
J’ai ouvert ma fenêtre
Et je t’ai jetée dans la rue
Lune
Dans une flaque
Où tu as continué à luire quelques instants
Puis tu t’en es allée
Toute seule
Lune
Sur ton cheval tout tâché
De boue
Tu as escaladé les amas d'étoiles d'or
T'élevant
Jusqu'à ton orbe
Puis de là-haut
Tu m'as lancé une fiole
D’alcool
Ô Lune folle
Là
Je danse ivre
Dans la Lune
OLÉ!
I
LE CHAGRIN AVEC LA GUITARE NOIRE
Les flammes s’éteignaient dans les pleurs
Et la musique entraînait mon chagrin
Et ma tristesse
Dans la douleur
Avec sa Guitare noire !
II
L’ÉTALON NOIR
Le cheval d’argent de l’Espoir
M’emporte sur le dos brillant du soir
Et tire de part d’autre
Des coups sur la bride
Dans les couteaux
Des Ténèbres
LES NUITS OCÉANES
Comme l’océan déplie ses lames
De mon amour coulent des larmes
Il pleut tout doucement sur les arbres
Où tombe la nuit
L’âme vaporeuse s’élève
Sur des rivages-sables lisses
Où doucement glisse
Ma nuit
Derrière les arbres l’océan
Répand une vapeur de larmes
Sur mon cœur où tout doucement
Glisse la nuit
De l’océan
Comment savoir pourquoi
Elle fut si amère
La pomme du savoir
Qui versa goutte à goutte
Son poison dans mon cœur
Ô Destin
Et pourquoi ma Passion
Fut-elle si sincère
Quand d’un amour trop pur
Coulaient ces gouttes de poison
Dans mon cœur à travers l’Azur
Qui pleurait sans raison
D’une pomme trop mûre
Sur mon cœur
Dans la nuit
Comme l’océan déplie ses lames
De mon amour coulent des larmes
Il pleut tout doucement sur les arbres
Où tombe la nuit
LA PLANÈTE NÉANT
Il est une Étoile
Au ciel
Sous laquelle se fixe
Mon Soleil
Impassible planète
La planète-Néant
L’Étoile de ma Mort !